La crèche départementale 7 rue Kleynhoff est placée dans un endroit avec des taux de polluants élevés
Texte de Dalia Obeid (Docteur es sciences, Spécialiste en santé publique, habitante rue Benoit Malon à Gentilly) :
Le trafic routier représente une grande source de pollution atmosphérique surtout dans les zones urbaines. Les véhicules émettent différents polluants toxiques comme les composés organiques volatils (y inclus le benzène), les particules fines, les oxydes d’azote (NOx), le gaz carbonique, le monoxyde de carbone (CO), les métaux lourds et les hydrocarbures aromatiques polycycliques.
L’augmentation des niveaux de ces polluants est associée avec des effets sur la santé à court et à long terme (1) comme l’augmentation des crises d’asthme, de la toux, de la mortalité, des hospitalisations pour pathologies respiratoires, des cancers bronchiques, des pathologies cardiovasculaires, etc.
Selon les différentes études en France et à l’international, les niveaux de polluants dépendent fortement du degré de proximité des grands axes routiers (2). Sur le périphérique parisien, 1.2 million de véhicules circulent chaque jour émettant des polluants toxiques jusqu’à 400 m aux alentours. La qualité de l’air sur le boulevard périphérique et notamment autour la porte de Gentilly a fait l’objet des mesures et des calculs effectués par le réseau de surveillance Airparif (3) .Trois polluants liés au trafic routier ont été mesurés : le benzène, le dioxyde d’azote et les microparticules. Les objectifs de qualité pour le dioxyde d'azote (40 µg/m3) ont été dépassés en moyenne sur une bande de 200 m de part et d'autre du Périphérique (13ème et 14ème arrondissements de Paris, la commune de Gentilly). Quant aux niveaux de benzène et de microparticules, ils étaient problématiques aux abords immédiats du Périphérique sur une bande de quelques dizaines de mètres.
Selon les constats, quel que soit le polluant considéré, plus on s'éloigne du trafic, les niveaux de pollution diminuent, jusqu'à rejoindre le niveau de base de l'agglomération parisienne.
Du côté de la commune de Gentilly, la baisse de teneurs des polluants avec l’éloignement du boulevard Périphérique est moins rapide que du côté du stade Charlety, compte tenu de l’influence des axes routiers locaux et de l’impact d’une urbanisation dense. A 100 m du périphérique, l’avenue Paul Vaillant Couturier engendre une augmentation des concentrations en benzène (3).
Aiparif s’est aussi intéressé sur la qualité de l’air dans les établissements recevant des publics sensibles comme les personnes âgées et les enfants(4). Un dépassement des normes de ces trois polluants cités ci-dessus est observé dans les établissements (crèches, écoles maternelles et primaires, hôpitaux et foyers d’hébergement) situés à moins de 40 m (en moyenne) des axes routiers importants (5). Les polluants pénètrent à l’intérieur des locaux contribuant à l’augmentation importante de la pollution intérieure du bâtiment. Dans une étude menée à Helsinki et Amsterdam (6), il a été estimé que de 70 % à 84 % des microparticules (PM2,5) mesurées à l’intérieur des établissements étudiés provenaient du trafic extérieur.
La relation entre proximité du trafic et risque sanitaire a été démontrée chez les publics sensibles et surtout les enfants (public exclusif de la crèche Kleynhoff) dont la maturation pulmonaire n’est pas atteinte que jusqu’à l’âge de 8 ans. Ci-dessous quelques données récentes sur la santé des enfants vivant à proximité des axes routiers :
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Une Cohorte de 208 enfants en Californie : les crises d’asthme sont augmentées de 83% par quartile d’expositions au NO2, l’utilisation des médicaments broncho-dilatateurs augmentent de 89% pour une distance de 150 m de l’autoroute, une altération de la maturation de la fonction respiratoire pour des enfants résidant à moins de 500 mètres d’une autoroute (7).
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Une étude dans différents endroits des états unis : Les enfants vivant à moins de 500 m d’un grand axe routier sont 5 fois plus susceptibles d’avoir une altération de la fonction pulmonaire, comparés à ceux vivant à plus de 1500 m (8).
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Une cohorte de 4146 enfants néerlandais suivis durant les 4 premières années de leur vie (9) : Une proportion accrue de de rhumes, de grippes, d’infections ORL, d’asthme, de sifflements bronchiques est observée de 20 à 30 % chez les enfants vivant à côté des axes routiers denses. De plus une hypersensibilité aux allergènes alimentaires et des effets délétères dès la vie fœtale est observée.
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Une étude américaine de 1080 enfants vivant à des distances différentes du trafic : les crises d’asthme est deux fois plus élevées chez les enfants vivant à 75 m d’une autoroute que les autres (10).
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D’autres études européennes plus récentes ont confirmé les mêmes impacts sanitaires de la proximité de la pollution atmosphérique sur les enfants (11)
Tous ces éléments nous poussent à considérer l’impact sanitaire sérieux du trafic routier sur la crèche Kleynhoff (et l’école maternelle et primaire Lamartine) située à 30 m du Boulevard périphérique et de l’avenue P.V. Couturier d’où la nécessité d’un déménagement urgent de cette crèche qui respire tous les jours les divers polluants du boulevard périphérique.
De plus, et dans le but de réduire la pollution atmosphérique de Gentilly qui est située entre l’autoroute la plus dense de l’Europe et entre le boulevard périphérique et qui possède un certain nombre des axes routiers locaux, il est nécessaire de développer une intervention pour lutter contre les polluants qui s’imposent. Une des solutions faisables pour limiter la pollution atmosphérique est l’augmentation de la superficie des espaces verts dans les zones urbaines (12).
Selon une étude de l’université de Birmingham publiée en 2012, Thomas Pugh et ses collègues ont démontré que les arbres, les arbustes et autres verdures pourraient réduire les niveaux de dioxyde d’azote et des microparticules d’une façon spectaculaire. Selon l’étude, différents types de végétation comme le lierre sont capables de réduire le taux de NO2 de 40% et de PM de 60% au niveau des rues (13) A l’ombre de ces résultats et pour faire face à la pollution atmosphérique de Gentilly, l’augmentation la superficie des espaces verts devient primordiale surtout que la commune ne respecte pas les recommandations de l’Organisation Mondiale de la santé (un minimum de 10 m carré d’espaces verts par habitant, répartis d’une façon équitable).
Références :
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http://apps.who.int/iris/bitstream/10665/107571/1/E83080.pdf
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Impact dans les écoles en bordure du périphérique parisien : https://www.airparif.asso.fr/pollution/air-interieur-ecole#etude
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Analyse spécifique d'Airparif à Gentily : http://www.airparif.asso.fr/_pdf/publications/Rgentilly_volet2.pdf
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Airparif, 2011, La qualité de l'air en Ile-de-France en 2010. 100 p
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Yli-Tuomi, T., T. Lanki, G. Hoek, B. Brunekreef et J. Pekkanen, 2008, Determination of the sources of indoor pm2.5 in amsterdam and helsinki. Environ. Sci. Technol., 42 : 4440-6.
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Brauer, M, G. Hoek, HA. Smit, JC. de Jongste, J. Gerritsen, DS. Postma, M. Kerkhof et B. Brunekreef, 2007, Air pollution and development of asthma, allergy and infections in a birth cohort. Eur. Respir. J., 29 : 879-88.
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Janice J. Kim, Karen Huen, Sara Adams, Svetlana Smorodinsky, Abby Hoats, Brian Malig, Michael Lipsett, and Bart Ostro. Environ Health Perspect. 2008 Sep ; 116(9) : 1274–1279. Published online 2008 May 27. Doi : 10.1289/ehp.10735
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Pugh, T. A. M., MacKenzie, A. R., Whyatt, J. D., Hewitt, C. N .: Effectiveness of Green Infrastructure for Improvement of Air Quality in Urban Street Canyons, Environ. Sci. Tech., 46, 7692-7699, http://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/es300826w, 2012.
Articles plus généralistes :
"La pollution près du trafic"
Numéro D'actualités d'Airparif de décembre 2012 portant sur :
http://www.airparif.asso.fr/_pdf/publications/NUMERO39.pdf
"La A6 et le périph empêchent Gentilly de respirer"
La biodiversité a besoin de l’urbanisme et l’urbanisme a besoin de la biodiversité
"L’installation d’une nature en ville s’accélère notamment depuis le Grenelle de l’Environnement. Cette nature nous rend de multiples services aussi en milieu urbain, comme les régulations des pollutions. Elle améliore notre quotidien, les ambiances, nos rapports sociaux et notre santé. Le verdissement est en plein développement mais végétaliser comme le font les paysagistes et les jardiniers actuellement ne favorise pas toujours la biodiversité." Lien vers l'article
La santé, enjeu urbain et territorial
"Dans sa relation à la ville, la santé est une notion qui va au-delà de la question du soin. Entendue dans une acceptation large, elle intègre la prévention, le bien-être et la qualité de vie des citoyens. Ce sont autant de leviers pour mettre en œuvre des politiques de santé publique. Le changement climatique a des conséquences directes sur les citoyens. Travailler à son atténuation est une des clés pour replacer l’humain en bonne santé au cœur de la fabrique urbaine : végétaliser la ville, réapprendre à vivre avec la nature en protégeant la biodiversité. Être en bonne santé suppose également de bien manger et de faire du sport ! Cela passe par une action des territoires et des citoyens pour relocaliser le système alimentaire. Cela passe aussi par la mise à disposition d’infrastructures permettant de faire du sport, à haut niveau, ou par des mobilités douces."
ASPECTS DE SANTÉ PUBLIQUE SPÉCIFIQUES DE GENTILLY
Gentilly, qui possède une forte densité de population et en particulier le quartier du Plateau sont coincés au cœur d'un triangle délimité par les deux branches de l'autoroute A6 et le boulevard périphérique parisien.
1 - Nous nous interrogeons, en particulier, sur l'ouverture de la crèche Kleynhoff à 40 mètres du périphérique.
Cette étude confirme l'intérêt de renforcer l'îlot Paix-Reims en pleine terre (Corridor vert, bien plus éloigné de l'A6A et du périphérique). Argumentaire ci-après avec l'article (à télécharger : PDF - Janvier 2017) de Dalia Obeid (Docteur es sciences, Spécialiste en santé publique, habitante rue Benoit Malon à Gentilly)
2 - Article (juin 2017) "Evaluation d’Impact de Santé du projet d’aménagement îlot Paix-Reims" par Dalia Obeid (Docteur es sciences, Spécialiste en santé publique, habitante rue Benoit Malon à Gentilly)
3 - Nous nous interrogeons sur la disparition de l'îlot Paix-Reims (actuellement à + de 70% de couverture végétale) dans le contexte du réchauffement climatique, couplé à la pollution engendrée par la proximité du quartier avec le périphérique et les pics de canicule récurrents ces dernières années. "Les zones industrielles, les emprises ferroviaires ou les quartiers résidentiels très denses chauffent très vite en été et emmagasinent la chaleur du soleil toute la journée. Ils composent un îlot de chaleur urbain caractéristique des grandes agglomérations. Inversement les lieux marqués par la présence d’eau et de végétaux sont les seules véritables zones de frais en ville et constituent ainsi des éléments essentiels de l’aménagement urbain." (extrait page 9 : document présentation projet "coeur de Plateau" fourni par MGP)
Ainsi, il apparait nettement sur la figure 1, représentant la Thermographie d'été (20 août 2010) que l'îlot Paix-Reims est la seule zone de "fraicheur" du quartier du Plateau, dans une zone chaude (rouge) très urbanisée, la plus urbanisée de Gentilly ! (Fig 1 ci-dessous). Comme nous l'avions montré auparavant dans nos préconisations et dans le chapitre Trame verte avec les mesures de l’indicateur de couverture végétale, il est aussi nécessaire de posséder une surface suffisamment grande pour permettre la réflectance détectable avec CORINE Land Cover donc nous le montrons aussi ici, une zone de fraicheur.
4 - Nous nous interrogeons sur la disparition du seul "vrai" espace public de plein air de proximité, d'une dimension suffisante pour permettre aux enfants à la sortie de l'école de pouvoir "se dépenser" au plein air. Dans une période où la sédentarité (sans compter l'accumulation des polluants dans l'intérieur des habitations et sur les trottoirs très étroits qui caractérisent les rues du quartier du Plateau sans aucun espace public) la sédentarité donc, devient un facteur prouvé d'augmentation des cancers et de l'obésité, la décision de supprimer l'îlot Paix-Reims en particulier le petit square des enfants fait prendre un risque avéré d'atteinte à la santé publique et en particulier à celle des enfants. Nous ne revenons pas ici sur l'apport social et de bien-être (décrit au chapitre Nature et santé).
Fig. 2 : Cartographie des contraintes d'environnement à Gentilly (extrait du diagnostic et pré-PLU 2007 de Gentilly, en cours sur la ville).
Télécharger le rapport de présentation du PLU PADD, qui contient un diagnostic et explique les choix effectués téléchargeable sur le site de la ville.
Un déficit d'espaces publics étaient déjà noté en 2007...
Ci-dessous extrait des contraintes environnementales :
Fig. 1 : Cartographie de la thermographie sur Gentilly (extrait du document de présentation du projet fourni par APUR à MGP). A superposer avec les cartes : de la pollution spécifique à Gentilly (ci-contre), le détail de la fig 2 "contraintes environnementales" (ci-contre) ainsi que l'indicateur CORINE Land Cover.
Il apparait lisiblement l'îlot de fraicheur que constitue l'îlot Paix-Reims, véritable poumon pour les habitants du quartier et en particulier nos enfants et les personnes les plus vulnérables.
Ilot de chaleur à Gentilly (carte ci-contre avec la densité du bâti) : https://cartoviz.iau-idf.fr/?id_appli=imu&x=651929.7881750974&y=6856988.286689654&zoom=11
par Cartoviz IAU Ile de France.
Bibliographie didactique : Ilot de chaleur urbain (ICU) / Ilot de fraicheur urbain
"L’îlot de chaleur urbain et le lien avec la qualité de l’air". "Urban heat island and linkage with air quality". Claire GREUILLET et Laurence GALSOMIÈS
Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie
dans : POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE - NUMÉRO SPÉCIAL - JUIN 2013
"L’îlot de chaleur urbain à Paris. Un microclimat au coeur de la ville"
APC Agence Parisienne du Climat et Météo France
Levy A. Changement climatique, îlot de chaleur urbain et impacts sanitaires : Paris et son urbanisme. Environ Risque Santé 2016 ; 15 : 351-356. doi : 10.1684/ers.2016.0888
ALBERT LEVY, Architecte urbaniste UMR CNRS 7218 LAVUE Laboratoire Architecture, Ville, Urbanisme, Environnement ENSA Paris Val-de-Seine 3, quai Panhard et Levassor 75013 Paris http://www.lavue.cnrs.fr/
Tirés à part : <alblevy AT club-internet.fr>
Mots clés : chaleur extrême ; changement climatique ; densité de population ; espace vert ; îlot de chaleur urbain ; santé environnementale ; santé publique ; urbanisme.
Illustrations du phénomène : Les îlots de chaleur urbains à Paris par APUR Décembre 2012
http://www.apur.org/sites/default/files/documents/ilot_chaleur_urbains_paris_cahier1.pdf
Effet des revêtementsSource : APUR | Effet de la végétationLa végétation possède un impact important sur le climat urbain. On le constate durant les nuits de canicule. Source : APUR |
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Effet d'un vue dégagéePiégeage de la chaleur en ville. Source : APUR | Effet de convergence des ventsEffet de convergence des vents en ville. Source : Météo France |
Evolution vagues de chaleurSource : Météo France |
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BIBLIOGRAPHIE ARGUMENTÉE
Arguments
Références bibliographiques illustrées :
Biblio / Actualités
Inégalités sociales liées aux inégalités environnementales : voir nos cartographies (chapitre dédié : "Arpentage et Lire les cartes")
"Pollution de l’air dans les écoles et crèches du Val-de-Marne" (article 28 mars 2019) :